Sommes-nous dignes de nos héros? Un an après le sacrifice d’Arnaud Beltrame ; un mois après l’action décisive, au péril de leur vie, de 25 sapeurs-pompiers qui ont, seuls, sauvé Notre-Dame de Paris de l’effondrement ; voici que deux commandos de marine, Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello, sont tombés sous les balles d’islamistes preneurs d’otages.
La cérémonie nationale aux Invalides aujourd’hui ne peut nous exonérer d’une question de conscience, individuelle et collective: sommes-nous dignes de ces sacrifices? Le contraste des parcours de vie est vertigineux entre ces soldats d’élite morts au combat et ceux qu’ils ont sauvés. D’un côté, des hommes d’exception de 28 et 33 ans, engagés à 18 et 20 ans, d’innombrables actes de bravoure et citations à leur actif. De l’autre, une groupe de quatre touristes imprudents, dont deux enseignants français s’étant approchés d’une zone pourtant réputée dangereuse.
La France de 2019 est-elle digne de ses héros? Car il s’agit bien ici de la France, de nous tous, plutôt que du contraste banal entre des personnes d’exception et des individus ordinaires.
Julie, la caissière du Super U de Tarbes sauvée par Arnaud Beltrame ; Patrick Picque et Laurent Lassimouillas, libérés par l’opération militaire de la semaine dernière, ne doivent en effet leur vie qu’à une seule chose: leur identité française. C’est au nom de cette appartenance à la nation français que les 200.000 gendarmes et militaires français d’active engagent leurs vies au quotidien, pour protéger leurs compatriotes, leurs modes de vie et leur patrimoine le plus précieux.
C’est à un véritable examen de conscience collectif que nous devons nous livrer aujourd’hui, du président de la République jusqu’au citoyen français le plus ordinaire. Remplissons-nous toute notre part du contrat qui nous lie à la nation, pour laquelle nos militaires meurent?
À l’évidence, les milliers de black blocs et de «gilets jaunes» radicalisés ou paumés, qui veulent faire tomber le pays et épuiser nos forces de l’ordre les samedis et jours fériés ne prennent plus part à ce contrat. Ils doivent être combattus sans répit avec toutes les armes d’une démocratie de droit qui ne saurait accepter plus longtemps la tyrannie de minorités violentes. Combattre avec la même fermeté les colporteurs de haine qui pullulent sur les réseaux sociaux- ceux qui, chez les islamistes ou dans les rangs de l’extrême gauche, se réjouissaient de l’incendie de Notre-Dame de Paris, en relativisaient la portée ou conspuaient l’incroyable générosité des petits et grands donateurs de sa reconstruction. Si ces adversaires déclarés de la nation et de tout ce qui nous lie depuis des siècles sont identifiés, ils ne sauraient nous exonérer de nos propres inconséquences. Celles des partis politiques qui font campagne contre l’idée même de nation française dans le seul espoir de gagner des sièges au Parlement européen. Celles d’une certaine technostructure parisienne qui n’arrive toujours pas à se libérer d’un logiciel strictement comptable ou juridique, au point de négliger l’essentiel, à savoir notre souveraineté et les moyens à lui donner en priorité absolue. Et la vie concrète des gens, là où ils habitent, c’est-à-dire souvent très loin du cœur de Paris.
Les inconséquences, enfin, d’une approche soixante-huitarde de l’information, de la culture et de l’éducation, toujours pas guérie de son relativisme culturel et de son antimilitarisme. Le sacrifice de Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello portera beaucoup de fruits si leurs débiteurs à vie, Patrick Picque et Laurent Lassimouillas, consacrent le restant de leur vie professionnelle à enseigner à leurs élèves et collègues qu’ils ne seraient pas là s’il n’y avait pas la France et son armée pour mettre hors d’état de nuire les islamistes, ici comme en Afrique. Ils pourront aller sur toutes les antennes, notamment du service public, rappeler à leurs journalistes et leurs audiences que, décidément non, toutes les cultures, tous les comportements face à la vie humaine en général, et la liberté des femmes en particulier, ne se valent pas. Qu’il existe bien peu de pays dans le monde qui, à l’instar de la France, mettront tous les moyens possibles, jusqu’aux vies de leurs plus grands soldats, pour protéger leurs ressortissants, où qu’ils soient, aussi petits soient-ils. Dire, au fond, qu’ils ne seraient rien, ou si peu de chose, sans la France.
«Ils ont donné leur vie pour la France»
Puisse cette tragédie servir de leçon, pas seulement pour les rescapés, mais pour toute une société française qui croit pouvoir s’affranchir de la nation. Nous redécouvrons, à travers ces sacrifices récents, qu’elle est aujourd’hui le lien le plus puissant et le plus éprouvé pour nous tenir ensemble, debout et libres, face aux menaces du temps présent. Le caporal Nathanaël Josselin et le sergent Simon Cartannaz, décédés dans l’explosion au gaz de la rue de Trévise le 12 janvier dernier, le lieutenant-colonel Beltrame, les maîtres Cédric de Pierrepont et Alain Bertoncello ne se sont pas engagés pour des idéologies sectaires, des religions dévoyées, des idéaux éthérés. Encore moins pour l’argent ou la gloire personnelle. Ils ont donné leur vie pour la France.
Individuellement, quel Français oserait affirmer que sa seule vie est digne du sacrifice de ces héros? C’est collectivement que nous pouvons en être dignes, à condition d’oser à nouveau dire «nous». À condition de neutraliser nos adversaires, où qu’ils soient. Et de proclamer notre fierté d’appartenir à une nation dont l’histoire, l’identité et les promesses justifient de tels engagements.
Pcc Edouard Tetreau
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